Arnaud plonge la main dans l'une des poches de son manteau et en ressort quelques unes des cartes avec lesquelles il a joué le soir même.
« Je les avais sur moi quand les rats sont sortis du mur derrière l'armoire, alors je les ai emportées, sans réfléchir... »
Il tend quelques unes des cartes pour les montrer : les cartes semblent normales, même si compte tenu de ce qui s'est passé, les illustrations de démons ou de morts vivants qui sont le propre des cartes noires ont de quoi donner la chair de poule.
Arnaud récupère de nouvelles cartes dans sa poche, et consulte rapidement l'ensemble de son deck : il s'arrête net quand il voit une carte qui le laisse sans voix. « C'est pas vrai... »
Il n'a pas le temps de montrer la carte à ses amis que les secours arrivent. Les ambulanciers s'occupent immédiatement de Fabien, qu'ils font monter dans le véhicule avec l'ensemble du groupe.
« Tous ceux qui ont été mordus viennent avec nous ! Allez, vite, on a des appels de partout dans le quartier ! »
Arnaud est le seul du groupe à ne pas avoir été mordu, mais il accompagne tout de même ses amis, inquiets pour leur santé, en particulier celle de Fabien, qui n'a toujours pas repris conscience. Il demande s'il y a un risque d'infection pour ses amis, à quoi un infirmier répond d'un hochement de tête avant de commenter : « Les rats ne se comportent pas comme ça d'ordinaire. Il vaut mieux prendre toutes les précautions nécessaires. Mais soyez rassurés, vous allez être pris en charge à l'hôpital. ».
Effectivement, à peine arrivés à l'hôpital-Dieu, le groupe d'amis est dirigé vers un service emménagé spécialement pour la situation. L'un des brancardiers qui s'occupe de Fabien explique au groupe ce qui l'attend : « On emmène votre ami aux urgences. Vous, vous attendez ici. Enfin, tous ceux qui ont été mordus ou ont été au contact directs des rats. C'est compris ? »
Autour du groupe, d'autres personnes, pour la plupart légèrement blessées, attendent dans un couloir où les chaises libres font défaut. Quand un médecin arrive, peu de temps après le départ du brancardier, Arnaud explique qu'il n'a pas été mordu et demande à rejoindre Fabien pour suivre son évolution. Il s'excuse maladroitement auprès de ses amis, visiblement navré de les avoir entraînés dans une histoire aussi sordide, puis les quitte en leur promettant de revenir leur donner des nouvelles de Fabien dès qu'il en aurait.
Olaf, Thomas et Starky sont contraints d'attendre au milieu des autres blessés. Le fait de mettre au même endroit des personnes potentiellement porteuses d'une infection ne les rassure pas vraiment, mais les médecins ont l'air de savoir ce qu'ils font... ou du moins, ils le prétendent. Un spécialiste a été appelé d'urgence depuis un autre hôpital parisien, mais il ne semble pas prêter grande attention aux conditions de salubrité du lieu mis à disposition pour les blessés.
Cette branche de l'hôpital, pour tout dire, ressemble à une aile désaffectée qui n'aurait pas été entretenue depuis des mois. L'urgence de la situation a obligé les services publics à improviser, ce qu'ils font avec plus ou moins de talent. Les autres blessés, une petite dizaine actuellement, sachant que d'autres sont visiblement en cours d'acheminement, occupent toutes les places assises. Une mère et sa fillette ont été contraintes de s'asseoir à même le sol, en plein courant d'air. Les sanglots de la fillette n'ont pas l'air d'émouvoir les autres personnes qui ont réquisitionné les sièges, dont un livreur de pizzas, un groupe d'adolescents, et un clochard qui semble bien être le seul à se satisfaire de la situation. « Qu'est ce qu'on s'marre pas vrai ? Hum... Ouais, j'me marre moi ! C'est ma philosophie de vie à moi ! J'me marre ! Les rats, j les connais. Pas la première fois, non, pas la première fois qu'ils me mordent les saligots ! Tenez, j'vous montre mes blessures de guerre si vous voulez ! Ouep, de guerre ! J'ai pas peur de le dire, de guerre ! Et... »
L'une des adolescentes s'emporte : « Tu peux pas fermer ta grande gueule ! » Le clochard lui fait de gros yeux : « D'mon temps, les gamines comme toi sortaient pas si tard, ma jolie ! Ou alors c'était des... »
Le médecin passe dans le couloir, faisant taire tout le monde tandis qu'il s'approche d'Olaf.
« Bon, vous, vous avez été salement amoché. » regardant Starky et Thomas : « Hum... c'est vous qui êtes venus avec un homme inconscient ? Venez, je vais vous prendre en priorité pour que vous puissiez rejoindre votre ami. »
A l'attention d'Olaf : « En ce qui vous concerne, il faudra vous faire soigner ces vilaines blessures. Vous en avez pour plusieurs jours ici, je le crains. »
Olaf, Thomas et Starky entrent dans le bureau improvisé du spécialiste, assisté par le médecin et une infirmière. Il ausculte chacun des amis, pose quelques questions d'ordre général, laisse l'infirmière se charger des premiers soins sous le contrôle du médecin, puis conclue :
« Bon, a priori rien de grave dans l'immédiat. Vous allez quand même devoir rester ici pour surveillance au moins cette nuit. Je repasserai demain matin pour voir dans quel état vous vous trouvez. »
Concernant Olaf : « En ce qui vous concerne, il faudra probablement rester un peu plus longtemps, vous avez été bien mordu. Je laisserai mes collègues décider de ça quand ils passeront vous voir demain. »
Alors qu'il allait laisser partir les trois amis, le spécialiste commente :
« Ce qui est étonnant, c'est que vous ayez été aussi exposés. Les autres personnes que j'ai reçues étaient plus légèrement blessées. Que s'est il passé ? »
Il est visible que le spécialiste regrette déjà d'avoir posé la question : un air las apparaît sur son visage, comme pour indiquer que finalement, non, il préfère ne rien en savoir compte tenu de la charge de travail qui l'attend encore : s'il devait poser la question à chaque patient et écouter attentivement les récits de chacun, il en aurait pour des heures...
L'infirmière raccompagne les amis dans le couloir : « Venez, je vous en prie. » D'une voix des plus agréables, mi désolée, mi résignée, elle annonce la mauvaise nouvelle à laquelle on pouvait s'attendre : « Nous n'avons pas de chambre libre donc il vous faudra patienter ici. Si vous avez des questions, demandez Clarisse. »
@Tous :